Le champ des merles (2015-2021)
« Comment t’expliquer, mon frère, certains appellent cette région Serbie, d’autres Albanie. Qui sait ce qu’elle est en réalité ! On aurait du mal à trouver en ce monde une autre région de plaine où une vieille tragédie continue à projeter sans relâche, de façon cyclique de nouvelles tragédies. Cette terre porte le nom innocent de Champ des merles, autrement dit Kosovo ».
Ismaïl Kadaré « Trois chants funèbres pour le Kosovo ».
Petit pays enclavé du sud de l’Europe, lorsque le Kosovo émerge de l’actualité, c’est bien souvent pour de tristes raisons. L’histoire du Kosovo se confond avec celle des Balkans, elle est complexe, parsemée de drames et de changements politique. Il n’est pas évident de lire et de comprendre l’histoire de cette région.
Le champ des merles est un voyage au cœur des Balkans, un récit photographique, un regard personnel sur le Kosovo actuel. Ce projet est un récit visuel navigant entre documentaire et une vision contemplative et poétique, dans une région en proie à de multiples tensions.
Le champ des merles viens du nom serbe « Kosovo Polje ». La bataille du champ des merles a eu lieu en 1389 au Kosovo, elle marque l’arrivée des ottomans dans les Balkans. Cet évènement bien que peu connu en France a servi de fondation au mythe serbe au Kosovo, selon lequel il s’agit du berceau de leur nation. C’est une date importante dans l’histoire des Balkans et de l’Europe. En effet c’est à cette époque qu’une partie de la région s’est convertis à l’Islam.
Loin des réalités politique et des enjeux internationaux je parcours ce pays à la recherche d’un ailleurs mystérieux. Ce pays me paraît si loin et si proche à la fois. Il n’est pas rare de se croire loin de l’Europe. Certains soirs d’été vous pouvez entendre l’appel à la prière du muézine en même temps que des chants de femmes, les aboiements d’un chien venant rythmer cette mélodie. Une odeur d’épices et la poussière des routes ajoutent une note d’Orient à ce tableau assez éloigné de l’Europe occidentale. À quelques kilomètres des grandes villes vous passez des téléphones portables derniers cris aux villages restés inchangés depuis l’époque de Tito. Voilà sûrement l’une des raisons qui me font aimer ce pays. Il y a bien sûr la gentillesse des gens, leur accueil, les paysages de montagne, la musique ; mais ce que j’aime particulièrement c’est le rapport au temps et ce sentiment d’être à la fois chez moi et ailleurs. Là-bas je me sens libre et curieux de découvrir un pays et une culture rarement mis en avant.
« How to explain to you, my brother, some call this region Serbia, others Albania. Who knows what it really is! It would be hard to find in this world another plain region where an old tragedy continues to relentlessly, cyclically project new tragedies. This land bears the innocent name of Blackbird Field, in other words Kosovo ”.
Ismaïl Kadaré “Three funeral songs for Kosovo”.
A small landlocked country in southern Europe, when Kosovo emerges from the news it is often for sad reasons. The history of Kosovo merges with that of the Balkans, it is complex, strewn with drama and political changes. It is not easy to read and understand the history of this region.
Le champ des merles is a journey to the heart of the Balkans, a photographic story, a personal look at present-day Kosovo. This project is a visual narrative navigating between documentary and a contemplative and poetic vision, in a region plagued by multiple tensions.
Le champ des merles comes from the Serbian name « Kosovo Polje ». The Battle of the Blackbird Field took place in 1389 in Kosovo, it marks the arrival of the Ottomans in the Balkans. This event, although little known in France, served as the foundation for the Serbian myth in Kosovo that it is the cradle of their nation. It is an important date in the history of the Balkans and of Europe. Indeed, it was during this time that part of the region converted to Islam.
Far from political realities and international issues, I travel this country in search of a mysterious elsewhere. This country seems so far away and so close at the same time. It is not uncommon to think that you are far from Europe. Some summer evenings you can hear the call to prayer of the muezine along with the songs of women, the barking of a dog punctuating this melody. The smell of spices and the dust of the roads add a touch of the Orient to this rather distant picture from Western Europe. A few kilometers from the big cities you pass the latest cell phones to villages that have remained unchanged since the time of Tito. This is surely one of the reasons that make me love this country. There is of course the kindness of the people, their welcome, the mountain landscapes, the music; but what I particularly like is the relationship to time and this feeling of being both at home and elsewhere. There I feel free and curious to discover a country and a culture that is rarely highlighted.